lundi 27 janvier 2014

Bibliographie

- VAN GENNEP Arnold, Les rites de passage, A. et J. Picard, 1970
- NANTET Bernard, Dictionnaire de l'Afrique, Larousse, In Extenso, 2006
- METEGUE N'NAH Nicolas, Histoire du Gabon : Des origines à l'aube du XXIe siècle, L'Harmattan,, Etudes Africaines, 2006
-  LAVAL-JEANTET Marion, Paroles d'un enfant du Bwiti : Les enseignements d'Iboga, L'Originel, 2005
-  GOLLNHOFER Otto et SILLANS Roger, La Mémoire d'un peuple, Ethno-histoire des Mitsogho, ethnie du Gabon Central, Editions Présence Africaine, 2000

Sources Internet (logiciel Pearltrees):



dimanche 26 janvier 2014

En plus


           Paquet servant à transporter une feuille ou une écorce 



                                           Feuille d'Iboga 



Cuisson d'écorces et des feuilles d'Iboga dans des marmites pour des médicaments



                                                      Rite Mwiri 



                     Transmission des savoirs aux Banzi (initié)
















                      Chants rituels Bwiti à la tombée de la nuit








                                   Cérémonie de veillée Bwiti 


vendredi 24 janvier 2014

Conclusion


Nous avons donc observés différents rites de passage chez deux tribus du Gabon : les Mitsogho et les Myènè. Nous avons pu constater que les rites de passages de l'enfance à l'âge adulte, qu'ils soient féminins ou masculins, sont un symbole de destruction de l'ancienne personnalité et de renaissance. Ils tiennent donc un rôle extrêmement important dans les sociétés, en particulier du point de vu social. Ils permettent, grâce a une différenciation selon le sexe (les rites de passages n'étant pas les mêmes selon le sexe), d'instaurer une cohésion sociale au sein d'une tribu. En effet, les garçons, en acquérant leur statut d'homme, peuvent assurer le contrôle de la société organisée et la perpétuation des valeurs éthiques d’une génération à une autre. A partir de ce moment-là, ils appartiennent réellement à la tribu, et alors qu'ils étaient depuis toujours sous le contrôle et la protection de leur mère, ils deviennent les figures du respect et de l'autorité. Les jeunes filles, quant à elles, obtiennent leur statut de femmes : elles deviennent responsables de l'instruction et de l'éducation morale des enfants de la tribu. Lors de ces rites, elles apprennent leur rôle de femme, leur rôle en tant que Mère de la société. Les rites de passage de l'enfance à l'âge adulte sont donc une étape primordiale dans la vie d'un initié : filles et garçons y apprennent leurs rôles respectifs dans la société. Ces différentes initiations selon le sexe sont donc très importantes pour la cohésion sociale au sein d'une tribu.

Evolution des rites




Les rites et traditions ont évolué au fil du temps suite à différents facteurs. Nous allons observer cette évolution, ainsi que ses impacts sur la valeur et la pérennité des rites dans les tribus.


Le Ndjembe fait partie de ces rites ayant subi des modifications. En effet, les pratiques de ce rituel se sont adaptées à la modernité. On rencontre tout d'abord ces changements dans les costumes utilisées lors du Ndjembé. En effet, les costumes, notamment, fais traditionnellement de peaux d’animaux, d’écorces d’arbres ou de feuilles de bananier se sont transformés en de simples assemblages de pagnes ou de rafia.



Dans le cas de la circoncision, on observe des changements au niveau de la règlementation et du mode de prise en charge. L'initié peut par exemple choisir de se faire opérer par un médecin traditionnel ou bien par un médecin professionnel. En effet, les risques mortels liés à la mauvaise condition de l'opération de circoncision ont permis de modifier et d'adapter le moyen de circoncision. Cependant, afin de prouver leur valeur, de nombreux jeunes choisissent encore de se faire opérer par un médecin traditionnel, ce qui pose un réel problème et soulève une question : faut-il interdire la circoncision ?

Risques et dangers



Dans les tribus Mitsogho et Myéné, les rites d’initiation sont certes obligatoire pour pouvoir passer de l’enfance a l’âge adulte mais ils entraînent malheureusement souvent des risques et danger physiques et psychologiques.
En général, les différents rites utilisés dans ces tribus engendrent souvent les mêmes risques et dangers. Tout d’abord, il peut y avoir des effets toniques, les effets qui ont lieu lors du rite peuvent persister encore après la fin de l’initiation. On appelle cela des effets à long terme. Il peut y avoir des effets dévastateurs physiques et mentaux. C'est-à-dire des douleurs, ainsi que des traumatismes. Après le rite, les substances avalées peuvent provoquer des maladies. Lors des différents rites les initiés peuvent mourir s'ils ne supportent pas les  différents rituels.

Par exemple, la circoncision est pratiquée  par des médecins traditionnels. Il peut donc  y avoir des risques d'infection ou bien des accidents. Il y a eu de nombreux morts suite à de mauvaises conditions d'hygiène.

Lors du rite du bwiti, la plante d'Iboga utilisée dans cette initiation a des propriétés psychodysleptiques c'est-à-dire dangereuses pour la santé mentale qui peuvent avoir un effet sur le cerveau (Hallucinations...).
Voici une photo de la poudre d'iboga.
 
Lors de ce rite, des coups de marteaux sont également donnés sur la tête pouvant provoquer la mort si l’initié ne supporte pas les coups. De plus, la langue est transpercée par une aiguille non stérilisée ce qui peux provoquer une infection. Ce rite provoque aussi de fortes nausées, des vomissements ainsi qu’un état d’asthénie musculaire qui est une dégradation de l’état général qui se traduit par une fatigue physique.

Voici une femme possédé lors d'un rite de sorcellerie.
 
Les initiés dont le rite dure plusieurs jours reviennent souvent bouleversés, las et dégoutés à l’idée de reprendre de cette plante.

Le Bwiti peut aussi engendrer une incoordination motrice, une anesthésie partielle, une hypothermie qui est une baisse de température centrale du corps ou une hyperthermie intermittente qui est une hausse de la fièvre.

Même si la plupart du temps les rites provoquent des risques et dangers, nous avons découvert que certains rites et certaines substances utilisés lors des rites ont été reconnus comme prévention contre certains problèmes.
Par exemple, la circoncision a été reconnue comme une mesure de prévention efficace du VIH. Le risque de VIH est réduit mais il n'est pas écarté.
La plante Iboga utilisée lors du Bwiti est censée donner des visions, et peut être utilisée comme sevrage d'alcool et de drogues mais si elle est mal préparée, cela peut provoquer la mort.
Il y a quelques rites comme l’excision qui commencent à être interdits dans certains villages. Dans d'autres tribu, cette pratique n'est pas encore interdite, mais elle n’est pas obligatoire. Les femmes peuvent choisir. Néanmoins, au Gabon, et donc dans les tribus que nous avons étudié, l'excision est déjà interdite.


Transmission des rites et traditions



Avant 1960 le Gabon était considéré comme un pays sans Histoire, ou bien que celle-ci dépendait uniquement des occidentaux. Les peuples n'étaient en réalité pas suffisamment outillés pour faire partager cette Histoire au reste du monde. Cependant, leur culture, et notamment les rites et traditions se sont transmis d'années en années grâce à la parole : c'est ainsi que la transmission orale s'est élevée au rang d'art chez les tribus du Gabon. Cette discipline qu'est la tradition orale est réservée à des « maîtres de la parole », plus communément appelés « griots ». Ils constituent ce que l'on appelle la « mémoire vivante de l'Afrique ».
Les griots occupent ainsi une place importante dans la tribu et sont respectés et admirés par la société. Les liens du sang étant sacré, ce métier se transmet nécessairement de père en fils. Ils sont à la fois conteurs, historiens, danseurs et musiciens. Il existe différents mode de transmission orale. Le chant occupe une place prépondérante dans la tradition orale. En effet, les griots chantent les coutumes et les valeurs de leur peuple, le plus souvent accompagnés d'instruments de musique, et ce à tout moment de la vie et en particulier lors des cérémonies rituelles. Le conte est également un des modes de transmission orale les plus important. Il est créé par et pour le peuple, et conté aux jeunes par les anciens. Il dépend étroitement de la culture et de la géographie physique du peuple qui l'a produit. Moins récurent, mais également très important, le mythe fait parti de ces récits fabuleux qui tentent d’expliquer la fondation des principes et des valeurs d’une société. Il repose sur deux questions primordiales « qui a créé le monde ? » et « quelle est la place de l’Homme dans ce monde ? ». A la différence du conte où la barrière entre le réel et l’irréel est plus ou moins perceptible, le mythe, lui, est lié au surnaturel. Dans l’Afrique traditionnelle il est considéré comme «  la parole sérieuse » de laquelle on n’ose pas douter. Il est essentiellement réservé à des auditoires choisis tels que des cercles d'initiés. On retrouve également des proverbes, toujours récités aux jeunes par les anciens. Certains conteurs énoncent leurs proverbes avant de les développer par un conte leur permettant d'argumenter et d'imager le proverbe.



Pour les africains, l'oralité représente le monde des traditions, l'écriture représente le monde de la modernité occidentale. Cependant, le fait que les épopées se transmettent presque exclusivement par voie orale soulève la question sur la valeur des versions actuelles, l'Histoire des tribus pouvant être modifiée au fil des siècles. 



Fonctions des rites



" Devenir une femme - ou un homme - ça se mérite. Et ce n’est pas de la tarte. Le chemin vers l’âge adulte est non seulement semé d’embûches, mais en plus pavé de rites de passage. Le passage, c’est celui d’un état à un autre: il implique une mort symbolique- marquée de souffrances bien réelles - et une renaissance, qui s’incarne souvent dans un nouveau statut social. Les rites de passage s’appliquent à une foule de choses: développer un pouvoir, se préparer à la vie maritale, se former  aux sciences ésotériques, aux remèdes thérapeutiques ou à la politique. Mais l’effort paie: les Initiés en retirent un savoir secret en même temps qu’une place enviée au sein de la société. Car bien sûr, si le contenu des rites initiatiques doit demeurer caché, l’appartenance au groupe élu doit, elle, être bien visible. Comment faire savoir que vous avez rejoint une communauté secrète ? Grâce à divers signes de reconnaissance. Insignes, parures, statuettes et masques attestent que vous ne faites plus partie du commun des mortels. "

"Le Club des Initiés "Agathe Cordelle




Dans les deux tribus, Mitsogho et Myéné, les rites pratiqués servent à l'intégration dans la société, mais aussi à  l'initiation à la vie future.

Que ce soit chez les Mitsogho ou les Myéné, les rites ont pour fonction de leur inculquer différentes valeurs selon le sexe de la personne. Les femmes encore enfants ou adolescentes, seront initiées à devenir en quelque sorte «Femmes au foyer». Les hommes quand à eux seront initiés pour pouvoir bénéficier d'un statut beaucoup plus élevé dans la tribu.


Tout d'abord en ce qui concerne les femmes, les jeunes filles ont déjà une éducation qui les conduits petit à petit à devenir «Femmes au foyer», on leur apprend à devenir douce, prendre soin de la case, l’embellir et prendre soin d'elle car par exemple, pour pouvoir avoir accès au rite Mami Watta, les femmes doivent avoir dans leurs chambre des parfums, des poudres blanches, des jouets, des nounous, des fleurs. C'est-à-dire tout ce qui pourrait embellir une table et surtout un miroir servant à voir des choses mystiques.






Leur éducation est donc accompagné de différents rites qui les initie à plusieurs domaines. Tout d'abord dans la médecine, par exemple, lors d'un certain rite, elles doivent soigner un patient en le débarrassant d'un esprit ce qui est le cas lors du Mwiri qui est un rite de protection. Mais il y aussi des rites qui les initient a la sorcellerie comme le Mami Watta, qui est un rite qui consiste à voir l'avenir. Ce sont donc des voyantes. C'est un rite surtout pour les femmes mais qui n'exclue pas les hommes. Certains rites les initient aussi à la fertilité ainsi qu'au mariage.


                                                                                                                                    


Cette photo représente des femmes initiés au rite Mami Watta




Pour les hommes, leur éducation de jeune homme, ainsi que les rites doivent leurs enseigner certaines valeurs différentes des femmes: le courage, la sagesse, le dévouement absolu à la communauté ainsi que le respect des anciens. Le courage est d'ailleurs l'une des valeurs primordiales lors du rite appelé Bwiti car il y a des hallucinations provoquées par l’iboga. Le crâne du candidat est frappé trois fois avec un marteau pour libérer son esprit, et sa langue est piquée avec une aiguille. Tous les différents rites ainsi que les différentes valeurs doivent être acquises pour pouvoir avoir accès à un certain statut social, et grâce à cela ils gagnent leur liberté. Par exemple, le Bwiti est une initiation indispensable pour la promotion sociale à l'intérieur de la tribu car plus l'initié a des visions spectaculaires, plus il est mieux considéré. Les rites les initient à la socialisation, à la lutte contre la sorcellerie, comme les rites de protections du Mwiri utilisés aussi par les femmes, et les règlements de conflits. En faisant cela les hommes étalent leur savoir et leur habilité qu'ils ont donc appris tout le long de leur éducation. La circoncision qui est consacrée aux hommes, fait ressortir leur virilité et les placent au centre de la cellule familial. Quand au Bwiti qui est un rite provoquant des hallucinations, il sert à faire une révision de la vie et à donner selon eux la « clef du futur ».



Lors de leurs rites, les couleurs portés par les initiés ont chacune une signification particulière, elles ne sont pas choisies au hasard. Les couleurs peuvent être représentées avec un vêtement ou alors par de la poudre que l’on met sur son corps.

Tout d’abord, nous avons la couleur blanche qui a deux significations.
Lors des rites d’initiation le blanc est souvent la couleur de la première phase c'est-à-dire la lutte contre la mort.
Voici une photo prise lors du rite d’initiation le Bwiti.              


Mais en ce qui concerne le vaudou et la sorcellerie, le blanc est symbole de la propreté
Sur cette photo qui a été prise lors du rite Mami Watta (un rite vaudou), les femmes portent du blanc sur elles.
 
Ensuite, il y a le rouge qui est la couleur du sang et de la vie.
Sur cette photo, les deux hommes mangent de l’Iboga
(plante hallucinogène) pour le rite Bwiti. Ils ont tous les deux de la peinture sur le visage ainsi qu’un pagne rouge.
 


La couleur noire quant à elle est la couleur de la nuit, de la souffrance, de l'épreuve mais aussi parfois du mystère.
Sur cette photo, trois hommes sont habillés d'un pagne noir lors du rite du Bwiti.



 




Pour finir, dans les tribus Mitsogho et Myéné, les feuillage verts sont souvent la parure des initiés à la phase de la victoire de la vie.
Sur cette photo qui a été prise lors du rite Djembe, trois femmes sont vêtu de feuillage.


           



 
 

Différents rites de passage selon le sexe



L'origine des rites remonte à plusieurs décennies dont la date précise n'est pas déterminée. Pourtant, le but des rites reste le même, c'est-à-dire intégrer les adolescents au groupe social en leur imposant un modèle initiatique. Pour cela, les initiés doivent subir  à chaque fois des épreuves violentes tant au niveau mental qu'au niveau physique, exigeant une soumission totale. Ces rites de passage sont différents selon le sexe de l'initié.
Il existe de nombreuses tribus au Gabon, mais nous nous pencherons particulièrement sur deux d'entre-elles, les Myéné et les Mitsogho. 

Il existe un rite propre aux ethnies Myéné, réservé aux femmes. Celui-ci est un rite de passage assurant la transition entre le statut de la jeune fille et celui de la femme, c'est le Njembe.


                                          

Le Njembe est tout d'abord une tradition, mais c'est aussi une initiation autant spirituelle que physique. Ce n'est pas un rite quelconque, il est souvent associé à une société magique, parfois démoniaque, donnant aux initiés le pouvoir de communiquer avec les génies et l'au-delà. C'est un rite qui est exclusivement pratiqué par les femmes, tous les hommes en sont totalement exclus. Mais le Njembe est aussi une danse, pratiquée au cours de réunions secrètes entre initiées, mais aussi au cours de séances publiques. Les rites de passage ont lieu pendant deux ou trois semaines, au cours desquelles les aspirantes sont claustrées. Ce rite est pratiqué sous la direction d'une "Mère spirituelle", c'est elle qui est responsable.

                              



                                            


Dans le cas de la tribu des Mitsogho du Gabon, il existe beaucoup plus de rites tel que le Bwiti, la circoncision, ou encore le Mwiri. 
Mais l'on peut dire que le rite le plus important dans cette tribu est le Bwiti. Au départ, il s'agissait simplement de la religion des Pygmées du Gabon central, puis elle fut transmise au cours du dix-neuvième siècle, et se perpétue encore de nos jours. Cette tradition serait âgée de plusieurs millénaires. Parler "Bwiti" c'est avant tout le chanter et le danser. Contrairement au rite Njembe de la tribu des Myéné, le Bwiti est un rite de passage pubertaire strictement masculin.


                     
                                                                Pygmés qui chassent pour l'initiation 

                                        

A l'origine, le Bwiti est une spiritualité pygmée, une spiritualité de chasseurs-cueilleurs,qui prenaient le bois avant d'aller chasser. De cet usage qui s'est étalé sur des millénaires, ils ont acquis une sensibilité particulière au bois, qui fait qu'ils se contentent de très faibles doses. Le principe du Bwiti est contenu dans la racine même du mot bo-hete "émanciper", "libérer" littéralement "épandre un fluide hors du récipient". Les pygmées conçoivent l'homme comme incarné par des forces invisibles, et le corps comme la coque dont il doit s'échapper pour atteindre l'émancipation. Le but de ce rite est donc de  permettre au néophyte d'obtenir des visions spectaculaires grâce à la manducation d'écorces de racines de l'arbuste appelé "iboga".

                                        
                                                            Membres initiés au rite Bwiti

                                        
                                                          Cérémonie de veillée Bwiti

                     
"Le Bwiti est avant tout un culte dans lequel des femmes, réunies autour d'un feu, chantent et dansent. Ils se servent du feu pour enflammer des torches, pour purifier l'air, pour danser, pour découvrir des chemins de connaissance inhérents à la culture qu'ils sont en train de vivre."


                                           


                                              
L'iboga,arbuste atteignant 1,5 m à 2 m, produit des fleurs jaunâtres ou rosâtres, qui donnent des fruits à la chair sucrée ne contenant pas d'alcaloïdes psychoactifs.


                                 


                                  
Pour préparer l'iboga, l'écorce jaunâtre de la racine est râpée et la poudre obtenue peut être mangée directement ou délayée dans de l'eau pour préparer une boisson ou encore séchée pour être conservée.

L'initié peut réagir de deux manières différentes en fonction de la dose d'iboga qu'il absorbe. A faible dose (une lamelle de la surface d'un doigt) l'iboga provoque un accroissement de la perception qui, au début, fut surtout utile aux chasseurs pygmées pour ressentir le milieu forestier; ensuite le Bois a un effet stimulant qui permet de rester éveillé plusieurs jours d'affilée. 
Au contraire, à plus forte dose, il peut y avoir de fortes nausées, des vomissements, et un état d'asthénie musculaire durant lequel des visions se manifestent en nombre. Cet état pourrait se comparer à un état de médiumnité temporaire qui légitime l'expression "Voir dans le bois". C'est ce stade que cherchent à atteindre une fois pour toutes les bwitistes pendant l'initiation, avalant alors jusqu'à plusieurs centaines de grammes pour "s'ouvrir", entraînant parfois des états comateux dont les expérimentateurs reviennent avec le sentiment d'être "passés de l'autre côté", d'avoir fait une approche de la mort. Autant dire que l'initiation au Bwiti est une épreuve physique dont on revient généralement bouleversé, las et dégoûté par l'idée de reprendre de ce Bois.

                                  
                                    L'ingestion de raclures de racines d'iboga pour l'initiation.

  " J'ai fait le pas, j'ai mangé le Bois, et ça a bouleversé toute mon existence"

"Il n'est pas question de maîtriser quoi que ce soit, si tu n'as pas confiance tant pis pour toi, si tu cherches à te maîtriser pendant l'initiation, tu ne verras rien. Non, il ne faut aucune concentration, c'est le lâcher-prise qui marche. Laisse toi porter ! "






                                          


Après la préparation et la prise de bois sacré, vient l'épreuve de l'edika signifiant "protection". L'edika comprend un processus de fermeture à travers la prise de bois antidotes à l'iboga; de nombreuses bénédictions données par le groupe; ainsi que la mise en place d'un lien sorcier, par un sacrifice animal, qui est censé protéger l'initié, mais aussi marquer définitivement son appartenance au groupe bwitiste. En théorie, l'edika a lieu dans la foulée de l'initiation, mais il faut souvent plusieurs jours au banzi ( néophyte ) pour s'en remettre et au groupe pour finir avec soins les préparatifs de la fête.
L'iboga est censé avoir raclé les parois internes pour en exhumer les mauvais antécédents, et y avoir laissé un grand vide. Suivant cette conception très corporelle du mal mental, qui veut que le vomissement ait rejeté plus que des désordres physiologiques, il faut compenser l'action dépurative violente du Bois. L'edika est donc avant tout conçu comme un antidote aux effets secondaire du Bois, un médicament qui va tapisser l'estomac et les intestins qui ont été secoués, notamment grâce à l'huile de palme et à celle tirée du moabi, un bois devenu très rare dû à une exploitation forestière trop importante, qui entrent dans sa composition.
La recette initiale de l'edika vient des Masango, dont le nom signifie les "gens des feuilles". Un peuple en symbiose avec les plantes. L'edika est d'abord un repas rituel, une communion, qui aurait la vertu de fixer les révélations du banzi. On dit aussi que l'edika "pose" l'initié après l'épreuve. 
En effet, s'il y a eu irritation, cette préparation agit comme un pansement médicinal. D'autre part, il est connu au Gabon que de nombreux végétaux sont calmants, et ceux qui entrent dans la composition de l'edika le sont certainement.
                             

                                                      Début de la cérémonie l'Edika

Mais il faut savoir qu'il existe deux voies majeures dans le rite Bwiti, subdivisées en une kyrielle de sous-branches, dont les rituels et les techniques diffèrent sensiblement : C'est le Misoko et  le Disumba.
Tout d'abord, le Bwiti Misoko "les yeux" en langue tsogho, est un culte de consultation, dont le but est essentiellement thérapeutique. On y retrouve trois ou cinq bois, quelques fruits, des amandes de courge, des arachides, des huiles, et un sacrifice. Les ngangas durant le Bwiti  Misoko sont en colliers et pagnes de danse. Le but de ce rite est de gérer et résoudre les problèmes de la vie quotidienne. Ainsi, toute personne convaincue d'être attaquée par le mauvais sort, que le malheur s'acharne sur elle, ou que ses morts ne la laissent pas en paix, sera emmenée dans le monde invisible au moyen de l'iboga par le nganga accompagnateur, pour y régler ses difficultés.

                        
                                               Initiation au Bwiti Misoko, bain rituel

                        

                          


Dans un deuxième temps, il y a le Bwiti Disumba, du nom de la femme ancêtre dans le Bwiti des Mitsogho. Le Disumba se serait développé plus ouvertement que le Misoko, se modifiant sans cesse au gré des révélations des nganga (devin-guérisseurs) et des traditions ethniques ou chrétiennes qu'il intégrait aussitôt. Le but du rite Disumba est  de  conduire d'emblée le postulant au-delà des problèmes qu'il connait, pour lui permettre de concevoir son essence au-delà de l'existence, en communion avec la Lumière créatrice. C'est une expérience qui pourrait conduire, selon le Bwiti, jusqu'à rencontrer des vies antérieurs ou futures, le Créateur, et jusqu'aux fondements même de l'Univers.

                            
Initié du Disumba ne portant qu'un pagne rouge en fibres de raphia coloré  de rouge, représentant le sang de l'enfantement.

 Durant la première journée du rite Disumba, il y a une purification du corps: c'est une journée consacré aux soins, avec des vomitifs. Une journée entière à vomir. Le deuxième jour est consacré au nettoyage complet de l'espace où se déroulera l’initiation. Le nettoyage de ces lieux sacrés par le futur initié a une grande importance, il témoigne de la conscience dont il va faire preuve dans le rite. Cela permet également de s’assurer qu'aucun élément étranger ne viendra troubler les visions du mangeur de Bois. Ensuite, il y a le bain rituel, appelé le "baptême". L'initié doit tout d'abord avouer ses fautes passées à voix haute avant d’entrer dans la rivière.  Une poignée de feuilles d'iboga lui sont remises "Chaque fois que je verbalisais quelque chose dans mon cœur, je devais couper une feuille en deux et en jeter un morceau dans l'eau. Ainsi tout partait dans le lit de la rivière avec le courant." Ensuite, on le lave et on lui demande de faire un aller-retour entre les jambes du père d'initiation sous l'eau. Dans le Disumba des Mitsogho, la plus ancienne tradition, on fait passer le futur initié à travers une ouverture pratiquée dans un arbuste qu'on fait tenir debout dans la rivière. Ainsi, il passe symboliquement par la porte étroite qui annonce sa renaissance. Le père d'initiation place un petit bout de résine d'okoumé allumé sur une feuille figurant la pirogue du voyage initiatique, une feuille de mbongo. "Cette feuille a véritablement la forme d'une pirogue, elle flotte très bien sans chavirer. Une fois la flamme allumée dessus, elle doit passer entre les jambes du père initiateur, qui se tient devant toi dans l'eau, et partir sur le lit de la rivière sans s'échouer, ni à droite, ni à gauche." 
Après cela le baptême à proprement parler commence: 
-Les officiants vont tout d'abord chercher l'énorme gousse rouge qui se trouve dans la cime d'un parasolier, cet arbre de la forêt secondaire qu'on appelle le kombo-kombo, le 'double-patron" en quelque sorte. Cette gousse rouge ressemble à une petite matraque et du reste, on frappe la tête de l'initié avec pour l'ouvrir, faisant sortir de sa gangue une fleur qu'on lui fait avaler d'une traite sans mâcher. "Ah ! manger cette fleur est un sacré truc, elle a une espèce d'onctuosité qui te remplit. Tu sens que c'est une fleur qui entre en toi, et c'est d'un grand effet."
Enfin on fait sortir l'initié de la rivière, pour l'asseoir sur la berge devant une torche d'okoumé, et on lui donne la première bouchée de lamelles de Bois sacré serrés en boulettes "L'iboga était frais,et la première bouchée n'avait pas l'amertume des suivantes." Les instruments se mettent alors à jouer la harpe lancinante, puis la corne saccadée, appelant les adeptes à rejoindre le corps de garde. Tout le monde se lève pour revenir de la rivière et rejoindre le temple en passant par le cimetière  à la file indienne. Chacun une bougie à la main. Ensuite, à l'intérieur du temple, on place l'initié dans la partie droite en entrant, la partie dévolue aux femmes . L'initié est installé dans une petite antichambre qui figure pour lui le sein maternel et dont l'entrée est "la porte de la naissance". Là on le couche sur une natte, avec pour seuls objets autour de lui, une petite pirogue sculptée sur laquelle sont posés un perroquet de bois et une bougie. Et voila que le voyage de l'initié commence. Un de ces voyages que seul le Disumba et ses fortes doses de Bois savent procurer. "J'ai voyagé au-dessus du pays des morts, j'y voyais des queues interminables de gens qui attendaient à une porte derrière laquelle il y avait d'autres gens plus lumineux, moins sombres. Tous avaient comme des cagoules noires et des yeux brillants. Je survolais. J'ai survolé des plaines immenses avec toutes ces files de gens.Tant de monde. Puis je suis arrivé dans une immensité qui m'a coupé le souffle, et tout d'un coup, j'étais en plein cosmos. Et la j'ai douté de ce que je voyais tant c'était énorme et improbable. Pourtant tout semblait tellement réel et présent... Je filais dans le cosmos, je voyais tout et rien, et je me sentais guidé dans l'espace à une vitesse surprenante." 

                             
                                                          Danse à l'initiation du Bwiti 

On remarque certaines différences essentielles entre ces deux pratiques. Dans un premier temps, il y'a une différence au niveau du  dosage du bois. On prend beaucoup plus de bois dans le Disumba que dans le Misoko, et on ne l'ingère pas de la même manière.
Dans le Disumba généralement  on le prend en lamelles toutes fraîches de la longueur d'un doigt, roulées en boules, qu'on garde dans la bouche, puis qu'on avale; dans le Misoko, on prend un Bois qui a été préalablement séché au soleil, "nourri" de son énergie, puis râpé et plié pour être réduit en poudre. Poudre qu'on avalera à la cuillère ou dans une banane plantain fendue, quelquefois aidé d'une gorgée d'eau.

                     
                                      Banane initiatique que l'on donne pour l'initiation à l'iboga

 Ensuite, dans le Misoko, le groupe ne cesse de relancer le banzi (l'initié) pendant son initiation, et bien sûr le voyage est différent selon qu'on vous laisse partir librement (dans le Disumba) ou qu'on ne vous lâche pas une seconde (dans le Misoko).
Le Misoko et le Disumba ne conçoivent pas non plus le rapport au Temps, figuré par l'espace du corps de garde, de la même façon. Ainsi dans le Misoko, on place le banzi la tête vers l'entrée du corps de garde, regardant le poteau central, alors que dans le Disumba la tête est tournée vers l'autel. Des dizaines de détails dans le rituel affichent des différences symboliques entre les rites : chez les uns on ne croise pas les jambes dans le corps de garde, chez les autres on ne pose pas sa tête sur sa main pour montrer qu'on reste vaillant, etc.

                                  
" Quand je suis entré dans le temple, j'étais déjà bien dans le Bois, je sentais les choses d'une autre façon, mais c'était très supportable. Surtout en comparant au LSD que j'avais pu prendre par le passé. L'expérience n'avait rien de la violence du LSD. C'était très différent, je n'avais pas d'effets d'hallucinations, je ressentais seulement le monde autrement".

On trouve aussi la circoncision qui est une des initiations majeures au Gabon. Ce rite exclusivement masculin ( l'excision n'étant plus pratiquée au Gabon) marque la fin de l'enfance. Il est réalisé chez les jeunes garçons de cinq à neuf ans, néanmoins il arrive qu’il soit pratiqué vers l’âge de vingt ans. C’est un passage obligé pour accéder à un statut social. 


                                         



Introduction



Le Gabon, ou République Gabonaise, est un pays situé dans l'ouest de l'Afrique équatoriale et dont la capitale est Libreville. Avec 1,3 million d'habitants pour 267 667 kilomètres carré, le Gabon est un pays possédant une faible population. La faune et la flore y sont encore bien conservées. En effet, la forêt dense couvre plus de 75% de son territoire et son fleuve principal , l'Ogooué, traverse en grande partie le Gabon et est la voie privilégiée des rencontres entre tous les peuples depuis toujours. Les peuples gabonais ont en commun de mélanger au quotidien l'art et le sacré ainsi que d'être en totale symbiose avec l’environnement.
La culture gabonaise vit et c'est au travers des tribus que les traditions ancestrales et les rites fondateurs des ethnies gabonaises sont perpétués.
Afin d'observer et de comprendre ces pratiques rituelles, nous avons suivis l'histoire des traditions et notamment des rites de passage de l'enfance à l'âge adulte, chez deux tribus gabonaises importantes : les Mitsogho, du Centre Gabon, et les Myènè du Bas Ogooué.